La modification du statut fiscal applicable aux associés de sociétés d’exercice libéral dès le 1er janvier 2024

Les sociétés d’exercice libéral (SEL) sont des sociétés de nature singulière, du fait de leur objet social de nature civile (l’exercice d’une profession libérale) associé à une forme juridique commerciale, alignée sur celle des sociétés de capitaux soumises à l’impôt sur les sociétés.

Ce schéma dual a engendré une multitude de débats sur la qualification fiscale à retenir pour les rémunérations perçues par les associés des SEL en échange de leurs fonctions techniques (c’est-à-dire pour l’exercice de l’activité libérale en tant que telle, par exemple celle de médecin).

L’administration fiscale avait initialement pris position dans une réponse ministérielle « Cousin », rendue en 1996. Selon elle, les rémunérations des associés non dirigeants d’une SELARL, exerçant dans la société et n’ayant pas de clientèle personnelle, étaient assimilées au régime des traitements et salaires (TNS).

Quant au Conseil d’Etat, loin d’avoir ratifié cette position, il a estimé à plusieurs reprises que ces rémunérations techniques ne relevaient pas du régime fiscal des salaires, mais plutôt des BNC (bénéfices non commerciaux). Ces décisions concernaient respectivement les rémunérations d’un associé non dirigeant (CE, 16 oct. 2013, n° 339822) et d’un associé dirigeant (CE, 8 déc. 2017, n° 409429).

Le 15 décembre 2022, l’administration fiscale s’est rangée derrière la position de la Haute juridiction administrative, en modifiant le Bulletin officiel des Finances publiques (BoFip) en ce sens. Ainsi, dès 2023, il était prévu que les rémunérations techniques perçues par les associés de SEL devaient être déclarées et imposées comme des BNC, et non plus comme des salaires du régime TNS.

Une exception est cependant prévue par la doctrine administrative dans l’hypothèse où l’activité libérale est matériellement exercée dans des conditions traduisant l’existence, à l’égard de la société, d’un lien de subordination caractérisant une activité salariée. Dans cette hypothèse, la rémunération allouée relève de la catégorie des traitements et salaires. Il nous parait cependant compliqué, sauf cas rarissimes, d’établir un lien de subordination dans le contexte de l’exercice d’une profession libérale, rendant cette exception, à notre sens, dénuée de réelle substance.

Ce changement important avait vocation à s’appliquer à compter de 2023, c’est-à-dire pour les rémunérations techniques perçues en 2022 (la déclaration fiscale desdits revenus intervenant au printemps de l’année suivante).

Mais pour des raisons pratiques et dans une optique de transition, une tolérance de l’administration fiscale a permis aux intéressés de déclarer leurs revenus de 2022 dans l’une ou l’autre des catégories. Cette année de « rodage » a permis de palier l’instabilité normative en la matière.

Cette tolérance est maintenant révolue.

En effet, à partir de la future déclaration fiscale afférente aux revenus de 2024, les rémunérations techniques seront obligatoirement imposées dans la catégorie des BNC.

Le Cabinet LOREM AVOCATS est à votre disposition pour échanger sur cette problématique d’actualité. Il suit en effet quotidiennement les évolutions normatives et jurisprudentielles en la matière aux fins d’accompagner au mieux ses clients dans les évolutions qui en découlent.