La loi de finances 2024 a redéfini précisément le champ des exonérations prévues par l’article 787 B du Code général des impôts : le « Pacte Dutreil ».
Pour rappel, le pacte Dutreil est un mécanisme destiné aux transmissions infra-familiales, permettant une importante exonération des droits de mutation à titre gratuit.
Sont ainsi exonérées à hauteur de 75 % de leur valeur « les parts ou actions d’une société dont l’activité principale est industrielle, commerciale, au sens des articles 34 et 35, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès, entre vifs ou, en pleine propriété, à un fonds de pérennité mentionné à l’article 177 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises ».
S’il est prévu un engagement collectif de conservation des titres comme condition d’effectivité du dispositif, cet engagement peut être « réputé acquis ».
Cette modalité consiste, lorsqu’aucun pacte n’a été préalablement signé, à considérer l’engagement collectif requis par la loi fiscale comme rétroactivement établi. Ainsi, la conclusion formelle d’un engagement collectif n’est ici pas exigée.
La qualification d’engagement réputé acquis est subordonnée au respect de plusieurs conditions détaillées au 2 de l’article 787 B du Code général des impôts.
Tout d’abord, la société doit être détenue par une personne physique, directement ou indirectement (jusque deux niveaux d’interposition) depuis au moins deux ans.
Quant au seuil de détention prévu par les dispositions de l’article 787 B, il doit être respecté au jour de la transmission à titre gratuit et l’avoir au moins été de manière continue dans les deux années précédentes (deuxième condition).
La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser la troisième condition, liée à l’exercice effectif, depuis au moins deux ans, de l’une des fonctions éligibles ou de l’activité professionnelle par le ou les bénéficiaires.
L’interrogation était la suivante : ces fonctions peuvent-elles être exercées par le seul donateur et non par le bénéficiaire d’un pacte Dutreil ?
Classiquement, le raisonnement de l’administration consistait à affirmer que, dans cette situation, le donateur n’est signataire d’aucun engagement de conservation. Dès lors, il ne remplirait pas les exigences fixées au d de l’article 787 B du CGI (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10 et RM Moreau, n° 99759).
Dans son arrêt du 24 janvier 2024 (n° 22-10.413 FS-B), la Chambre commerciale de la Cour de cassation se range derrière la position de la doctrine administrative, en considérant qu’en cas d’engagement collectif réputé acquis, l’exonération s’applique uniquement « lorsque, pendant les trois années qui suivent la date de la transmission, l’un des héritiers, donataires ou légataires exerce effectivement dans la société son activité professionnelle principale » pour les sociétés de personnes « ou l’une des fonctions [de direction] » pour les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés.
Pour les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés, il n’est cependant pas requis que le bénéficiaire de la transmission exerce à titre habituel et principal son activité au sein de l’entreprise : est-ce à dire qu’une gestion administrative et commerciale qui assure la continuation de l’activité de production est suffisante, comme l’affirme la Cour d’Appel de Pau dans son arrêt du 10 janvier 2013 (n° 11/03410) ? La question reste, à ce jour, posée.
Quant à l’hypothèse où la fonction de direction est partagée entre le donateur et le donataire, la doctrine administrative admet que le donateur puisse également exercer une fonction de direction, parallèlement au donataire.
En toute hypothèse, la mise en place d’un pacte Dutreil en vue de limiter les droits de transmission de votre activité professionnelle doit être envisagée le plus tôt possible. Pour ce faire, le Cabinet LOREM Avocats est à votre disposition afin de procéder à la matérialisation d’un tel Pacte.